Pour des raisons pas très drôles, j’ai eu plus de temps que d’habitude pour regarder des séries TV et lire des livres. Et comme je le fais de temps en temps, je vais en profiter pour faire un petit récapitulatif de ce que j’ai aimé / pas aimé.
Pas de livre tech dans cette sélection, mais je suis en train de lire le livre “L’infrastructure as Code avec Terraform” de Julien Wittouck, qui aura probablement un article pour lui tout seul quand je l’aurai terminé.
Mark Manson - The art of not giving a f**k
En avril, j’étais vraiment au fond du trou. Une amie, peinée de me voir dans cet état, m’a offert un livre qui l’avait beaucoup aidé, elle.
“L’art subtil de s’en f**tre” (le titre en français ne capture pas pour moi l’intention initiale de l’auteur) est vendu comme “Un guide à contre-courant pour être soi-même”.
Je vais être franc (et peut-être passer pour un sale ingrat, désolé 😞) : ce livre de développement personnel n’a de “contre-courant” que le fait de contenir des grossièretés et des insultes. La personne qui résume le mieux ce livre (paradoxalement sans l’avoir lu, si j’ai bien compris), est Julia, qui m’a dit sur Twitter :
Sois toi-même mais ne sois pas trop toi-même mais écoute ton intuition mais ne t’écoute pas autant et sors de ta zone de confort mais aussi réussis chaque micro-aspect de ta vie tout en restant détaché de tes émotions mais aussi croque la vie à pleine dent mais aussi
Qui pourrait s’appliquer à n’importe quel livre de développement personnel, à vrai dire.
J’en retire quand même quelques bons passages au milieu des injonctions contradictoires, qui m’ont malgré tout fait un peu réfléchir (pas forcément sur le moment d’ailleurs) :
- On ne peut pas être tous exceptionnels, a fortiori dans plusieurs domaines ! C’est même le principe de l’exception et pourtant on nage h24 dans cette injonction.
- 4 pages fascinantes (sur 188) sur Ernest Becker et de son livre “The Denial of Death” que j’ai envie de lire.
- 2 anecdotes intéressantes, une sur le fondateur du groupe Megadeth et sa relation avec Metallica qui m’a amusée, une sur un soldat japonais sur une ile perdue pendant la Seconde Guerre mondiale.
Baptiste Beaulieu - où vont les larmes quand elles sèchent
Un roman “piscine” sur la vie, les galères et les joies du quotidien d’un médecin généraliste de ville un peu bobo qui se déplace à vélo et essaye de rendre la vie meilleure aux patients qu’il côtoie. Ce roman est inspiré de sa propre vie (ça se sent très vite).
La première partie est dure à lire, j’en ai eu les larmes aux yeux (attention aux parents de jeunes enfants, ça pique fort). Ça va mieux après, même si les sujets durs comme les VSS (violences sexuelles et sexistes), la maladie et la mort sont toujours présents, au détour du prochain chapitre.
C’est beau et triste, parce que ça sonne vrai. Je suis content de l’avoir lu. Plus léger et rapide à lire, j’ai aussi lu “Les gens sont beaux”, une BD adaptée pour expliquer l’acceptation de soi aux enfants.
Julia March - La fille pas sympa
Julia (encore elle, donc) m’a toujours fasciné, pour une raison que je ne parviens pas bien à expliquer. Peut-être parce que, même en tant que neurotypique (NT), j’ai longtemps été catégorisé dans les “weirdos” par la collectivité et que j’aimerais assumer ma (petite) différence, comme elle embrasse les siennes ?
Pour ceux qui ne la connaissent pas, Julia est autiste Asperger (il me semble que ça ne se dit plus trop comme ça maintenant, mais c’est décrit comme ça dans le livre, donc je me permets de le remettre tel quel).
J’ai échangé de manière épisodique avec elle sur Twitter pendant environ deux ans, lu ses “rants” les plus récents de son blog et finalement, sauté le pas et acheté le livre qu’elle a écrit, témoignage de ses jeunes années en tant qu’autiste, “camouflée” dans un monde qu’elle ne comprenait pas.
Il faut dire, sans trop spoiler, qu’elle a vécu un paquet de trucs qui aurait tout aussi chamboulé (voire plus) n’importe quel·le neurotypique, ne serait ce que le fait qu’elle ait vécu dans une famille de témoins de Jéhovah avec un père violent.
Le format peut paraître déconcertant (il y a même des commentaires négatifs en ce sens sur Amazon), c’est littéralement “la vie de Julia”, racontée comme si on romançait une “ligne de vie” faite chez un·e psychologue. D’ailleurs ça fait bien rire Julia, ce genre de commentaires, parce que c’est finalement clairement annoncé ;-). What did you expect les NT ?
J’en retire un peu moins de choses que je pensais sur l’autisme en général, car je pense m’être finalement pas mal documenté sans m’en rendre compte. C’était tout de même très intéressant d’avoir son récit, vu de l’intérieur, sur les manières dont elle s’est silencieusement adaptée au monde des neurotypiques.
Et j’ai appris beaucoup plus de choses que je ne l’aurais voulu sur les Témoins de Jéhovah, la crasse et la méchanceté humaine (en général) et les violences faites aux enfants.
Mathieu Palain - Nos pères, nos frères, nos amis
J’ai eu beaucoup de mal à trouver la force de finir ce livre (mais pas parce qu’il est nul).
Mathieu Palain est un journaliste qui a enquêté sur les violences sexuelles et sexistes, notamment en participant à des groupes de parole pour “soigner” les hommes violents, en participant à des auditions, en interviewant des victimes.
Le premier chapitre, c’est un coup de poing dans le ventre. La violence subie par la première victime est aussi tristement banale qu’insoutenable. L’injustice qu’elle a subie a probablement terminé de me dégoûter des hommes et de la justice d’aujourd’hui.
Pendant plusieurs mois, je n’ai pas pu aller plus loin que les quelques premiers chapitres. Et finalement, à force d’écumer en avril / mai les mini-séries sur Netflix, je suis tombé sur “Maid”, une mini-série relatant l’histoire d’une jeune mère victime de VSS. L’histoire nous plonge dans le quotidien de ces femmes / mères solos, parfois toujours sous emprise de leur conjoint violent, et j’ai voulu essayer de comprendre pourquoi les hommes en arrivaient là.
J’ai donc pris mon courage à deux mains, et rouvert “Nos pères, nos frères, nos amis”, pour essayer de trouver du sens aux comportements de cette frange de la population masculine. Malheureusement, je n’en ressors pas avec plus de compréhension.
Juste du dégoût, peu d’espoir pour l’avenir et un sentiment de déjà vu de plus en plus persistant au fil des “faits divers” (on en reparlera) qui s’enchaînent.
Au-delà de ça, le livre est quand même très bien écrit, et à lire, en particulier si vous n’avez pas ou peu conscience des mécanismes des VSS.
Rose Lamy / préparez-vous pour la bagarre - Défaire le discours sexiste dans les médias
Pour parachever mon bad trip au sein des VSS et des violences faites aux enfants (vous aviez vu apparaitre le pattern, ou non ? Je ne m’en suis pas rendu compte, sur le moment), j’ai décidé de finir par un livre glané au boulot.
Il s’agit d’un livre rédigé par l’auteure d’un compte Instagram (Préparez vous pour la bagarre) qui recense des exemples de méthodes utilisées dans les médias pour minimiser l’aspect systémique des VSS dans notre société.
Le format est déroutant, tant la liste d’exemples semble sans fin. Les titres des articles sont tous plus sordides les uns que les autres.
- “Marie Trintignant : Son fils Jules, futur mannequin ? La ressemblance est frappante”
- “Ma femme sert à rien” prétend le roi des baffes
Les réactions sur les plateaux TV et dans les journaux des personnalités politiques et people qui se défendent les uns les autres est glaçante.
Les mécanismes sont légion pour minimiser ce que les victimes ont subi, minimiser la responsabilité des auteurs des violences, voire inverser les rôles victime-agresseur, ou bien rendre les vraies victimes un peu coupables (il faut être une “bonne victime”), isoler les cas en les ramenant systématiquement à un “fait divers” et non pas à un phénomène de société plus global…
En pleines affaire Mazan (une “bonne victime”) et Nicolas Bedos (l’alcool est brandi comme une circonstance atténuante !? on nous ressort les “carrières brisées”), difficile de “ne plus voir” ces mécanismes, aussi bien dans les médias que sur les réseaux sociaux. Même sur LinkedIn, où on pourrait s’attendre à un peu de retenue, j’ai eu la gerbe plusieurs fois.
“Once you see it, you cannot unsee it”, comme on dit sur les Internets
Dans un contexte un peu différent, j’ai retrouvé les mêmes grossières ficelle à la suite du meurtre de Paul, le cycliste écrasé volontairement par un conducteur de SUV. Toutes les techniques décrites dans le livre pour minimiser les VSS ont été usées jusqu’à la corde pour minimiser la violence routière, en particulier dans les centres-villes.
Et la tech dans tout ça ?
Ça reviendra, je pense avoir fait le tour de ce que je voulais apprendre. Comme je le disais en introduction, j’ai bien entamé le livre sur Terraform de Julien. J’ai aussi récupéré à la Kubecon EU 2024 le livre “Kubernetes Patterns” (k8spatterns.com).
Et vous le savez peut-être, mais j’écris moi aussi un livre sur Kubernetes ;-), ce qui explique d’ailleurs en partie pourquoi je lis moins de livres techniques et que je publie (un peu) moins sur le blog. J’ai déjà la tête bien occupée.
Et si vous ne le saviez pas, je vous invite à aller sur le site que j’ai créé à l’occasion :